Je me questionne, Mum of two

Le mythe de la mère toute puissante

img_20180106_163243_0122655367718176013145.jpgD’aussi loin que je me souvienne, je me suis toujours imaginée mère. Peut-être parce que j’admirais beaucoup les modèles de mon entourage proche, parce que je m’identifiais à elles et que leur vie me faisait envie.

Dit comme cela, ça paraît plutôt sain. Et finalement, ce n’est que récemment que j’ai réalisé à quel point ce regard idéalisé sur mes modèles pouvait devenir un véritable piège et me faire perdre toute confiance dans mes qualités de mère.

Mais commençons par le commencement, avant de devenir mère à mon tour, quelle était l’image que j’avais de la maternité ?

Mes modèles

Le premier et le plus fort de mes modèles est, bien évidemment, ma mère. Je ne vous en ai jamais beaucoup parlé par ici, sûrement par pudeur, mais aussi parce que j’ai du mal, encore maintenant, à définir ma relation avec elle. Sur certains points, je lui ressemble énormément et je sens que je calque mon comportement sur le sien. Au contraire, sur d’autres points, j’ai un fonctionnement à l’opposé du sien, ce qui implique des phases d’incompréhension de part et d’autre.

Mais une chose est sûre, je l’admire énormément en tant que mère : sûre d’elle et de ses choix, peu voire pas du tout influencée par son entourage, réfléchie et à l’écoute de ses filles mais sans s’oublier elle-même, elle a toujours su garder une activité professionnelle extrêmement épanouissante pour elle et nous a toujours donné l’exemple d’une mère indépendante et épanouie. Je retrouve en elle beaucoup des grandes qualités portées par ma grand-mère, matriarche dans toute sa splendeur, qui gère avec brio tout son petit monde.

Mais je réalise aussi que mon père, ce grand émotif, prêt à tout sacrifier pour la chair de sa chair et qui fonctionne beaucoup à l’instinct, est aussi une figure parentale dans laquelle je me retrouve.

La dure réalité et la pression de l’entourage

Forcément, je partais avec un lourd bagage : je n’avais vraiment pas grand chose à reprocher à mes parents et à ma mère en particulier lorsque je suis devenue mère à mon tour. Autrement dit, la barre était placée haut pour réussir à être à la hauteur de la tradition familiale.

Je savais aussi ce que je ne voulais pas. Je ne voulais pas me perdre dans l’aventure de la maternité. Perdre le contrôle de mon corps. Perdre mon statut de professionnelle, acquis après 8 ans d’études. Perdre mon indépendance.

Oui, visiblement, j’avais beaucoup à perdre, dans cette histoire.

Et le seul moyen que j’ai trouvé pour me rassurer (et sur ce point, je suis certaine de ne pas être la seule, parmi les anxieuses de service #teamstressee), c’est de planifier. Enfin, de me projeter. D’envisager la suite, la reprise du boulot, la reprise du sport, le prochain voyage, le prochain resto en amoureux.

Forcément, quand la vie m’a rattrapée et que mon corps a commencé à me lâcher, quand ma fille a continué à avoir un sommeil chaotique pendant presque 2 ans, quand la dépression post partum est venue frapper à ma porte, je suis tombée des nues.

A tout cela, s’ajoute une pression de l’entourage que j’ai eu beaucoup de mal à supporter. Déjà, il y a la pression de la société qui persiste à faire peser sur les épaules des mères les moindres galères de leurs petits, et qui se traduit par diverses petits obstacles au quotidien, du regard plein de reproches de la puéricultrice de la crèche qui apprend que bébé a encore bu un biberon de lait à 3h du matin la nuit dernière, à celui plus accusateur du médecin qui ne comprend pas pourquoi bébé dort encore avec toi la nuit ; de la remarque vicieuse de la copine de maternité bien trop épanouie dans ses baskets de jeune maman, à la question tout sauf innocente du collègue qui se demande si ton petit fait ses nuits, nan mais toujours pas, c’est bizarre, non ?

Bref, au premier, tu te fais avoir, tu plonges la tête la première dedans. Au deuxième, tu te dis que mentir, c’est pas plus mal, finalement. Même si tu continues à souffrir des « comparaisons ».

Parce que, forcément, en bonne mère inquiète qui ne veut pas être moins que parfaite, tu te mets à scruter les profils des copinautes qui ont eu le bon goût de pondre en même temps que toi. Et là, quand ton petit bébé à toi décide de prendre son temps, c’est le drame.

La phase d’acceptation

Je crois qu’il m’a fallu vivre ces crises successives, sur le chemin de ma maternité, pour commencer à comprendre que le mythe de la Mère Toute Puissante, seule responsable du bonheur et de l’épanouissement de sa progéniture et, soyons fous, de toute sa famille au sens large (sans s’oublier au passage, hein, on n’est plus dans les années 50, nanméo !), c’est vraiment du bullshit en barre.

Je le sais, je le vois, je le lis. Des voix commencent à s’élever. Et moi je mûris, à la dure, je change.

C’est violent, le chemin pour devenir mère : passer de la matrice toute puissante, qui s’avère parfois défaillante et, justement, tellement impuissante à faire grandir la vie en elle, à la mère nourricière là encore déficiente, puis à la mère qui se détache et accompagne de plus en plus loin ; savoir se mettre à la bonne distance, pour elles, mais aussi, je le réalise maintenant, pour moi…. Tout ça, c’est un travail de longue haleine.

Est-ce que ma mère, si forte, si sûre d’elle, en est aussi passée par là ?

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Et maintenant ?

Le constat est là et, je le crois, accepté, à présent. Je ne peux pas tout contrôler pour mes enfants, quand bien même je le voudrais plus que tout, n’économisant ni mes forces dans la bataille, ni mon sacrifice.

Il existe ce que j’appelle ma sphère d’influence. Tout ce que je peux contrôler, maîtriser, tout ce sur quoi mes actions ont un effet.

Mais il y a aussi et surtout tout le reste, ce que je ne peux pas maîtriser, ce qui ne dépend pas de moi. Tout ce qui déconstruit, pas à pas, ce mythe de la Mère Toute Puissante.

Le concept de l’indépendance émotionnelle, dont je vous parlais l’autre jour, a été très libérateur sur ce point, me permettant notamment d’accepter le fait que je ne suis pas responsable de la manière dont mes enfants vivront les épreuves de leur vie.

Et puis il y a mes filles, dont la personnalité s’affine de jour en jour. Tout n’est pas gagné, loin de là, mais c’est fou comme je trouve cela plus facile de lâcher prise, de me sentir moins coupable au fur et à mesure qu’elles grandissent et qu’elles dépendent de moins en moins de moi pour survivre.

Je sais que la phase du nourrisson, du petit bébé dépendant, est une phase à risque pour moi : on verra si, du haut de mon immense expérience de Mum of two, je serai plus sereine pour ce petit troisième qui s’invite pour la fin de l’été….

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Et vous, vous en êtes où, côté culpabilité maternelle ? Vous aussi, vos modèles ont mis la barre haut ? Et comment vous vivez les petits échecs de la vie de vos petits ?

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16 réflexions au sujet de “Le mythe de la mère toute puissante”

  1. Oh merci merci ! Tu ne peux imaginer à quel point je me reconnais dans tout ce que tu écris.
    Cette pression de la société et de l’entourage. Chez moi aussi la barre est haute dans l’exemple des parents parfaits. Cette incompréhension de part et d’autres est toujours d’actualité et elle me rend parfois malheureuse car elle ne correspond pas à l’idéal que j’avais en tête.
    Ma maman n’est plus là, et on n’a jamais pu discuter de cette incompréhension. Comme la tienne, ma maman était sûre d’elle, pas du tout influençable, n’avait aucun regret et aucune culpabilité dans ses choix et ses actes. Ce qui est tout l’opposé de moi et l’objet de beaucoup d’incompréhension.
    Maintenant que je suis maman de deux, cette 2e naissance m’a épanouie. Sans pour autant être sûre de moi… Je me sens plus sereine, j’assume mes choix de maman beaucoup plus facilement, beaucoup moins mes choix de femme, mais ça viendra. Chaque difficulté rentrée est là pour nous faire ressortir plus grand. Je crois en toi Louna, maman de trois, tu vas y arriver je le sais.

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    1. Oh que tes mots me font chaud au coeur ! Je lis ton enthousiasme et je me dis que j’ai eu raison de le publier, cet article très personnel qui me faisait hésiter.
      Je vois que nos parcours, encore une fois, se ressemblent, et je suis sûre que toi aussi, tu vas continuer à grandir sur ton cheminement de maman. Tu le dis déjà, que cette deuxième fois t’épanouit, et ça me fait vraiment plaisir pour toi. Moi aussi, je crois en toi ! ❤

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  2. C’est un très bel article qui m’a ému. Merci pour ça! Je crois que tout en étant assez différente de toi émotionnellement ( en tout cas de ce que je peux en percevoir) on a une idée très proche du cheminement qui est exigé en tant que mère. Mon interrogation, ma surprise c’est à quel point on est pas préparées pour cela. Je suis d’accord avec toi, c’est à chacune de faire son chemin . N’est-ce pas le seul domaine de la vie pour lequel on n’est « à ce point » pas préparées?

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    1. Oh merci, cela me touche beaucoup !
      Oui, comme tu dis, on est assez différente, mais ça m’arrive aussi très régulièrement de me retrouver dans tes mots. Peut-être que notre fonctionnement n’est pas si différent, finalement ?
      Toujours est-il que, depuis que j’ai lu ta question, j’ai essayé de trouver un autre domaine de la vie où notre ignorance pourrait être comparable et…. pas moyen ! Je pense, en effet, qu’on n’est préparé ni à la violence de ce cheminement, ni à l’intensité et à la diversité qu’il peut représenter. D’un autre côté, je comprends à présent, avec le (peu de) recul que je commence à avoir, qu’il serait illusoire de vouloir préparer un autre que soi, non ? N’est-ce pas trop personnel, trop individuel pour qu’on puisse imaginer une formation au métier de parent ? En tout cas, c’est un sujet qui me passionne, et je crois que je n’ai pas fini de lire des blogs de Maman ! 😉

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  3. Je vois bien l’idee de la mère quasi parfaite sur laquelle on se calque. La première année de vie de ma fille, je véhiculais des concepts comme des vérités absolues, sans m’apercevoir que je ne faisais que dire et reproduire ce que j’avais entendu et connu. Le réveil a été douloureux, mais il m’a permis de m’emanciper en tant que personne. Non seulement j’ai construit ma propre manière d’être mère, mais j’ai commencé à vivre selon mes propres règles. Ma mère est formidable mais c’est quelqu’un de très fort psychologiquement, qui n’accepte pas la faiblesse, et pas très bien la différence. On ne se doute pas, je crois, du chemin que peuvent faire quelques phrases innocentes. « Les gens qui réussissent sont ceux qui sont actifs », « vouloir se marier c’est sacrifier son indépendance »… des phrases futiles, mais qui répétées tout au long d’une enfance en dessinent le carcan.

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    1. Oui, je sais que ton cheminement à toi aussi s’est parfois fait dans la douleur. Mais vraiment, avec le recul, je crois que ces périodes de crises sont les seules qui nous permettent de sortir de nos carcans et de nous affranchir réellement de ces quelques phrases innocentes qui ont pu nous blesser ou au moins heurter notre tendance naturelle à chercher des réponses dans telle ou telle direction. Tu ne crois pas ?

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      1. Oh oui, je suis d’accord. Cependant le réveil est arrivé plus tard que la période de crise si je peux dire. Mais tu as raison, c’est peut-être lié. J’ai souvent considéré ma depression post partum comme purement hormonal mais il y avait sûrement d’autres racines.

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  4. Perso, l’ombre de ma mère en tant que mère a plané sur les trois premières années de la vie de mon fils. Je suis passée par une très grosse crise existentielle l’année de ses trois ans mais c’est là où j’ai vraiment intégré que ma mère était loin de la mère parfaite. Je me suis sentie tellement mieux et ai commencé à devenir mon propre genre de maman. C’est d’une dureté extrême parfois de prendre sa place, de savoir où se situer…On a tellement de clichés et d’images dans la tête mais je pense qu’on peut y arriver avec le temps et l’expérience. Article qui fait beaucoup réfléchir!

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    1. Oui, je reconnais ce cheminement de la grosse crise qui finit par libérer. Comme tu dis, c’est violent, extrême, mais je pense que c’est aussi un moyen radical et efficace pour trouver sa place et s’affranchir de tous ces clichés, de tous ces imaginaires qu’on a pu avoir en tête et qui parfois, ne nous font pas du bien.
      Merci pour ton retour !

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  5. Moi je n’avais pas vraiment de modèle. Au contraire, mon objectif est de ne pas transmettre à mes enfants les défauts que ma mère m’a transmis. Il m’a fallu des années et des années pour les identifier et les combattre, mais dans les moments de doute et de fatigue, j’ai peur qu’ils refassent leur apparition. Alors je prends du recul, encore et toujours, et je me convainc que je fais de mon mieux pour mes enfants, ces êtres que j’aime le plus au monde.

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    1. C’est vrai, tu as raison, l’inverse n’est pas forcément plus facile, surtout quand le stress s’invite dans le quotidien.
      Je pense que malgré nos histoires différentes, nos modes de fonctionnement sont assez similaires, et je me retrouve dans tes mots : prendre du recul, encore et toujours, pour faire au mieux (et réussir à s’en convaincre !).

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  6. Tes mots m ont beaucoup émue . Je me reconnais énormément dans ces doutes constants et la comparaison qui fait mal .
    Maintenant je me dis que se poser des questions est sain. Ça permet d avancer et d ajuster . Merci beaucoup!

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    1. Oh oui, c’est sain, tous ces doutes ! C’est ça qui nous fait avancer et être de plus en plus sûre de nous. Il faut juste les doser pour qu’ils ne deviennent pas la seule pensée qui s’auto-entretient…. Courage !

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